Dialectique du Moi et de l’inconscient
Lecture Osiris
« Quand une voie (tao) se dessine pour l’homme moderne »
La dialectique du moi et de l’inconscient est un livre que publie Jung en 1933. Il correspond à un ouvrage qu’on pourrait dire de maturité bien qu’il arrive avant la série sur l’alchimie, point culminant de l’œuvre jungienne. Jung est un homme de 54 ans, c’est en homme sûr de ces découvertes qu’il écrit cette œuvre. Mais c’est aussi en homme prudent qu’il avance ses théories.
Avec ce livre, Jung présente une fois de plus sa conception du psychisme et sa méthode. Il réaffirme l’autonomie de l’inconscient et y précise ses concepts. Il rappelle que pour Freud, l’inconscient est essentiellement composé de tendances infantiles, qu’il s’est ainsi constitué de tous les refoulements successifs depuis la petite enfance. Une analyse aurait comme objectif d’éponger tous les dépôts du vécu personnel. Hors remarque Jung, une fois mis au clair ces dépôts, l’inconscient continue à créer des rêves et des fantasmes. Des désirs plus profonds encore semblent sourdre des profondeurs.
Selon lui, l’inconscient entretient essentiellement par rapport au conscient un rapport de compensation dans un but d’équilibre. Il est doté d’une fonction dite transcendantale. C’est une sorte de guide qui complète la personne. Suivre la voie de l’inconscient amènerait à un élargissement de la personnalité, Jung appelle cela le processus d’individuation.
L’individuation, un travail de différenciation avec le collectif : les grandes images, la persona
La voie jungienne consiste en une différenciation de ce qui est personnel et de ce qui est collectif afin de créer une conscience véritablement individuelle (l’individuation). L’inflation psychique correspond à l’identification aux contenus de l’inconscient, à certaines images qui peuvent littéralement posséder les individus. Le schizophrène qui se prend pour « le dieu » est possédé par ce contenu inconscient. L’archétype du « disciple » est aussi une image collective qui peut posséder des masses d’individus.
Quant à La persona, c’est un fragment de la personnalité collective acquise par un individu. C’est notre rôle social, le visage que l’on tourne vers les autres et par lequel les autres nous reconnaissent. C’est un masque qui dissimule cette psyché collective et donne trop souvent l’illusion de l’individualité. C’est lela psychologue, lela chef d’entreprise, qui investit sa fonction comme une composante personnelle. C’est la mère qui s’approprie l’engendrement de ses enfants. C’est un rôle déterminé par le collectif que nous avons emprunté et dont nous pensons trop souvent qu’il nous définit en tant que personne. S’identifier à ce rôle c’est se confondre avec la psyché collective. S’en différencier, c’est gagner en liberté et s’ouvrir à d’autres perspectives.
La fin de certaines identifications avec la psyché collective, sonne le retour vers des sources plus profondes et permet l’instauration d’une existence véritablement personnelle. La voie jungienne est donc une quête de réalisation au-delà des aliénations, des dépersonnalisations partielles, tantôt au profit d’un rôle extérieur tantôt au profit d’une importance imagée ou imaginaire.
L’individuation n’est pas un individualisme. C’est une voie prévue par la nature dont le conscient n’est pas le guide et qui nous amène à une acceptation plus large et plus authentique de notre appartenance à la communauté humaine. « En suivant pas à pas cette évolution, se crée petit à petit, un conscient qui n’est plus emprisonné dans le monde mesquin, étroitement personnel et susceptible du moi, mais qui participe au vaste monde des choses. »
Jung ouvre ensuite sur deux notions jumelles, l’anima et l’animus. Respectivement âme et esprit en latin. Quand l’une est la part féminine de l’homme, l’autre est la part masculine de la femme. Ces « complexes », pour reprendre un concept de Jung, agissent avec d’autant plus de forces négatives qu’ils sont inconscients. Pour Jung, plus une réalité psychique s’éloigne de la conscience, plus elle acquiert un statut d’autonomie dans la psyché. Ce sont donc des personnalités à part entières, liées aux influences parentales, mais qui semblent vivre une existence autonome sans que le sujet n’en prenne conscience. Négatives, elles éloignent le sujet des enjeux de sa propre vie, le rendent petit, orgueilleux, susceptible etc. Positives se sont les véritables inspiratrices de l’individu. La thérapie jungienne consiste à dégager l’anima et l’animus de la gangue de l’ombre personnelle et de l’héritage familial. Il s’agit ici, au sens propre du terme, de libérer l’âme. Il s’agit aussi de permettre à l’individu, d’entrer consciemment en lien avec cette autre en soi même, véritable porte ouverte sur l’éternité. Jung l’affirme, « qu’on le veuille ou non, l’âme est religieuse ».
Nous touchons à l’immense exigence de la voie jungienne, comprendre qu’il n’y a pas de liberté pour l’homme sans la prise en compte de son monde intérieur. Ce qui signifie s’ouvrir à une forme d’irrationnel devant lequel il faut aussi se déterminer. Ici pour Jung, réside le salut.
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